Dans son édition du 22 mars 2023, "L’Avenir BW" fait état d’une demande de permis pour un projet immobilier qui va poursuivre la minéralisation des sols dans le zoning Nord. Juste au sommet de la chaussée de Bruxelles, où les eaux de ruissellement que le sol n’absorbera plus se feront un plaisir de dévaler vers le centre de Wavre en cas de pluies abondantes. Préparez les bouées !

L’article de l’Avenir rappelle que le terrain menacé par ce projet, situé en bordure du golf de la Bawette, fait 18 hectares, principalement de nature.

Le promoteur BVLEU est présenté par la journaliste, Ariane Bilteryst, comme spécialisé dans les gros projets immobiliers commerciaux et de parcs d’affaires. Il est soutenu à 100% par la bourgmestre, Anne Masson, qui ajoute que "ce terrain est exceptionnel". Celle-ci poursuit ainsi dans la joie et la bonne humeur l’œuvre de ses prédécesseurs en matière d’étalement des zonings en béton et en bitume au détriment des espaces naturels.

La simulation 3D du projet a de quoi attirer les investisseurs potentiels. Que du beau béton, élégant, chaleureux, chouette à vivre, où tout le monde se sentira bien en pleine nature.

En pleine nature ? Oui, AVANT le début des travaux. La bourgmestre a raison sur un point : ce terrain est exceptionnel. De la nature, il y en a, actuellement. Et il n’y a pratiquement que cela. Pour l’instant. Et c’est ce qui fait l’intérêt de l’endroit, à la fois au niveau de la biodiversité, du paysage, de l’absorption de CO2... et des aspects environnementaux liés à Wavre puisque cette zone de 18 ha absorbe des eaux de pluie et réduit ainsi les risques de ruissellement qui ont été en partie la cause des inondations catastrophiques de juillet 2021. [1]

Voilà le paysage tel qu’on le découvre aujourd’hui en vue aérienne, merci Google Maps.

Et qu’en sera-t-il de cette nature lorsque le projet aboutira ? Eh bien, on en a déjà un bel aperçu grâce aux images fournies officiellement. On vous laisse comparer les deux situations.

Les zones bâties vont occuper 23% du terrain, soit plus de 4 ha. Un parking de 1000 places est prévu, avec la charge de pollution liée à cette masse énorme de véhicules dont les tuyaux d’échappement s’empresseront d’engraisser l’empreinte CO2 de la ville de Wavre. Et les personnes qui, matin et soir, sont coincées dans les embouteillages de cette rocade, seront heureuses de ne plus être seules et d’être rejointes par ce millier d’embouteillés complémentaires avec qui elles et ils pourront papoter sur la page Facebook "Wavre pour les embouteillés et les embouteillées 2.0".

A ce sujet, on peut se demander si la bourgmestre sort parfois de son bureau car, alors que la plupart des habitants de Wavre fuient cette zone matin et fin d’après-midi tant la circulation y est saturée, elle explique benoîtement que : "la question de l’accès à Wavre Nord n’est pas un problème et la circulation pour s’y rendre est fluide la plupart du temps". Traduisez "la plupart du temps" par "entre 19h et 7h ainsi que le week-end" et vous aurez la réalité de la situation en termes de mobilité.

Ce sont donc plus de 4 ha de nature qui vont être ainsi minéralisés. En compensation, on nous annonce que 450 arbres vont être plantés. Chouette ! Il leur faudra combien de temps, à ces arbres, pour parvenir à maturité et remplir le rôle de cette nature rasée ? S’agira-t-il d’espèces de décoration, pour le paraître et le greenwashing ou d’espèces locales, mellifères, adaptées à la biodiversité ? Et peut-on nous expliquer en quoi tout raser et replanter est meilleur pour la planète que... ne pas raser ce qui est déjà en place ?

Comment ne pas être choqué lorsque, alors que tous les signaux sont au rouge sur la planète, on continue à nier l’importance de maintenir la nature à Wavre au détriment des bétonneurs/promoteurs. C’est un exemple de plus de la nonchalance des autorités par rapport à notre futur et, surtout, à celui de nos enfants et petits enfants qui, si l’on continue à laisser faire, vivront dans un environnement totalement minéralisé. Où la nature ne pourra plus jouer l’un de ses rôles (outre l’essentiel, apporter de la vie et du bonheur) : les protéger des aléas climatiques. Des canicules torrides qui rendront les étés irrespirables. Ou des trombes d’eau qui noieront les zones proches des cours d’eau.

Ce projet est un exemple de ce que l’on ne devrait plus jamais faire.


[1Certes, ce ne sont pas 4 ha minéralisés qui causeront des inondations, mais ils s’ajoutent à d’autres menaces bien réelles où l’on recouvrira — ou on a déjà recouvert, merci entre autres à Matexi ! — des centaines d’ha. Le champ Sainte-Anne, un peu plus bas (670 logements), la nouvelle clinique St Pierre, juste en face, sur l’autre versant de la vallée ou même le projet "Rive verte", qui va transformer l’ultime zone de nature sauvage du centre (6 ha) en 335 logements... proche d’une zone inondable. C’est ce cumul, qui vient après bien d’autres destructions de zones naturelles, qui augmente le risque d’inondations pour la population du centre-ville.

Par Patrick Pinchart

Patrick Pinchart a travaillé toute sa vie dans la communication. Animateur à la RTBF, rédacteur en chef de Spirou à deux reprises, éditeur de bande dessinée, agent pour auteurs (BD, littérature...), correcteur, éditorialiste polémiste, il a de multiples autres collaborations : militant pour Amnesty International, Ecolo, Greenpeace, le WWF. Entre autres... Il s’exprime ici en son nom propre et en aucun cas au nom de ces différentes organisations. Il est également brasseur, fondateur de la brasserie HOPposition.