Après des séries de canicules à répétition, nous avons assisté, sidérés, aux inondations catastrophiques qui ont saccagé Wavre. Nos pensées vont vers ces personnes qui ont beaucoup, voire tout perdu. Et nous tenons à féliciter et à remercier toutes celles qui ont fait preuve de solidarité ainsi que tous les employés de la ville, pompiers, ouvriers communaux, les membres du collège communal, qui les ont aidés.

Si nous avons été sidérés, nous n’avons pas été surpris.

Une partie de la planète se noie, l’autre est en feu, et cela n’a rien de surprenant.

Car cela fait des décennies que des scientifiques dénoncent les effets délétères de l’activité humaine sur le changement climatique.

Cela fait des décennies que des scientifiques répètent que ces changements climatiques vont augmenter la fréquence des événements extrêmes, dômes de chaleur, canicules, incendies, inondations destructrices, tempêtes catastrophiques, tornades, etc.

Cela fait des décennies que ces alertes sont ignorées et que la nature qui, elle seule, si on la respecte, peut nous aider à éviter ces catastrophes, est détruite au nom de dogmes nommés “croissance économique”, “urbanisation”, “profit”, “société de consommation”...

Cette année 2021 a malheureusement démontré que ces alertes étaient fondées. On y a assisté à la concentration, en quelques semaines, de toutes les catastrophes annoncées. Il n’est plus possible d’en douter, nous sommes entrés dans le scénario du pire et, outre nos concitoyens actuels, on ne peut que songer à la détresse de la jeunesse qui voit son futur carbonisé ou englouti, malgré ses cris d’alerte, de désespoir et de colère lors des manifestations de 2018-2019.

Une partie de la planète est en feu, l’autre se noie et nous avons assisté en direct à trente années d’aveuglement, d’hypocrisie, de manipulations, de pression des lobbys, de déni, d’arrogance et de mépris (entre autres vis-à-vis de la jeunesse)... dont nous recueillons aujourd’hui les fruits empoisonnés, et cela durera des décennies, voire des siècles.

Wavre n’a pas encore brûlé mais il est démontré que les canicules vont s’aggraver, que les périodes de sécheresse vont se prolonger... et un jour, qui n’est pas très loin, Wavre brûlera peut-être aussi comme, cette année, ont été dévastées par le feu des régions de Grêce, de Turquie, de Californie, du Canada, de Sibérie, d’Italie, de Bulgarie, d’Algérie, du Brésil, du Maroc ou, auparavant, d’Australie, de Bornéo et même ou Groenland.

Wavre n’est pas responsable, bien entendu, du changement climatique.

Mais Wavre participe, à sa petite échelle, à ce désastre planétaire. Comme des centaines de milliers de villes qui ont continué à agir comme si de rien n’était en se disant que, si catastrophe il y aurait, ce serait chez les autres
On le sait désormais, la nature peut se venger partout.

Wavre participe à produire ces étincelles qui, ajoutées à celles de ces centaines de milliers de villes, mettent le feu à la planète.
Comment ? En détruisant, d’année en année, des espaces de nature, des arbres qui absorbent le CO2 et limitent les gaz à effet de serre, en ne réalisant que le strict minimum pour favoriser les moyens de locomotion non polluants.

Wavre participe à produire ces gouttes d’eau qui, ajoutées à celles de ces centaines de milliers de villes, noient la planète.
Comment ? En minéralisant les sols, en acceptant l’urbanisation à outrance, en favorisant le développement de zonings.

Les membres du conseil actuel ne sont pas responsables des décisions erronées de leurs prédécesseurs. S’ils étaient présents et qu’ils ont laissé faire en se taisant, laissons leur la tâche d’expliquer à leur enfants et petits-enfants pourquoi ils n’ont rien fait pour les empêcher.

Ils ne sont pas tous responsables du voûtement de la Dyle, qui a été un véritable amplificateur de l’inondation lorsque les eaux ont commencé à monter (et qui a banni de Wavre un spectacle que tant de villes nous enviaient, une rivière qui la traverse, apportant un espace de méditation et de la fraîcheur).

Ils ne sont pas tous responsables de la minéralisation de dizaines d’hectares naturels par des zonings de bitume et de béton.

Ils ne sont pas tous responsables de l’augmentation du CO2 par ces mêmes zonings et l’installation de commerces en périphérie, qui ont multiplié les déplacements en voiture.

Mais ils sont responsable des décisions qu’ils prennent dès aujourd’hui qui permettront d’éviter à nos enfants, à nos petits-enfants, aux générations ultérieures, d’échapper non seulement à ce que nous avons subi, mais aussi en pire.

C’est un immense chantier. Qui va impliquer les autorités communales, mais aussi les associations et chacun d’entre nous. Il nous appartient d’être vigilants et de ne plus laisser détruire les arbres et les haies. Il nous appartient de lutter contre les projets de lotissements (la Matexisation ou la Thomaspironisation, de sinistre mémoire, pour ne citer qu’eux, de tant de zones vertes aujourd’hui détruites) qui dévastentde nouveaux espaces de nature capables d’absorber les eaux de pluie et éviter les ruissellements qui provoquent les inondations. Il nous appartient de lutter contre toute tentative de minéralisation, bétonisation, bitumisation des espaces verts. Il nous appartient d’exiger que l’on déminéralise les places publiques pour y planter des arbres (en pleine terre, pas dans des pots) qui, non seulement, absorberont les eaux de pluie, mais ajouteront des espaces de diversité et, comme dans les villages des pays chauds, nous apporteront fraîcheur et ombrage qui nous aideront à lutter contre les canicules et dômes de chaleur qui vont s’intensifier ces prochaines années. A commencer par la place Cardinal Mercier et la place Alphonse Bosch. Mais nous y reviendrons.

(Une partie de cet article a servi à mon argumentation présentée au conseil communal de Wavre du 24 août 2021 à propos des inondations et de la nécessité de prévoir, désormais, des zones d’immersion temporaires : des espaces naturels ou aménagés où se répandent les eaux lors
du débordement des cours d’eau dans leur lit majeur).

Illustration de Hermann Traub de Pixabay

Par Patrick Pinchart

Patrick Pinchart a travaillé toute sa vie dans la communication. Animateur à la RTBF, rédacteur en chef de Spirou à deux reprises, éditeur de bande dessinée, agent pour auteurs (BD, littérature...), correcteur, éditorialiste polémiste, il a de multiples autres collaborations : militant pour Amnesty International, Ecolo, Greenpeace, le WWF. Entre autres... Il s’exprime ici en son nom propre et en aucun cas au nom de ces différentes organisations. Il est également brasseur, fondateur de la brasserie HOPposition.